Le 11 avril 2025 s’est tenu, à l’Agence wallonne du patrimoine (AWaP), une journée de rencontre qui a rassemblé des propriétaires et gestionnaires de parcs historiques, des chercheurs et experts issus des secteurs du patrimoine et de la nature pour un dialogue sur les questions liant biodiversité et patrimoine.
Coorganisé par l’AWaP et l’Association des Demeures historiques & Jardins de Belgique, cet événement a vu le jour grâce à une équipe de chercheurs de la Haute Ecole Charlemagne qui développe, depuis deux ans, un outil destiné à faciliter la gestion de la biodiversité dans des sites patrimoniaux, en particulier dans des parcs historiques.

Le patrimoine paysager, un réservoir de biodiversité
Face aux enjeux environnementaux et à l’effondrement de la biodiversité, le patrimoine paysager est aujourd’hui repensé en tant que réservoir de la biodiversité. Par leurs importants patrimoines végétal et aquatique, les parcs historiques offrent des espaces privilégiés pour la mise en œuvre de stratégies environnementales visant la protection de certaines espèces de la faune et de la flore, des milieux de vie et des habitats naturels (exemple : Natura 2000).
Depuis longtemps, les acteurs de terrain du secteur privé (associatif) ont compris la nécessité de développer une gestion écologique et différenciée de ce patrimoine historique, culturel et naturel, au bénéfice des générations futures, sans attendre les aides et les possibles subventions des pouvoirs publics…

Les parcs historiques, laboratoires d’innovation écologique
Depuis toujours, les parcs historiques ont été des laboratoires à ciel ouvert, propices
aux découvertes
à l’expérimentation
à l’innovation et
à l’introduction d’espèces végétales et animales nouvelles d’origines diverses, parfois lointaines (Asie, Afrique du Sud, Amérique).
La crise sanitaire de la Covid 19 a montré à quel point les parcs et jardins, notamment les parcs historiques urbains, constituent des havres de quiétude, de sociabilité et de bien-être pour les citoyens, à préserver et à valoriser.
La crise environnementale et climatique conforte le rôle des patrimoines paysagers dans la lutte contre l’artificialisation des sols, par le maintien de leurs fonctions vitales, la gestion de l’eau, la réduction de la concentration en CO2 grâce à un important patrimoine arboré capable de piéger le carbone.

La menace des espèces invasives et la gestion patrimoniale
Comme l’a rappelé un des chercheurs lors de cet événement, les espèces invasives constituent la 2ème cause de perte de biodiversité dans le monde. Mais au-delà des critères définis dans les règlementations pour catégoriser ces espèces (exotiques et indigènes) sur le terrain, il importe avant tout d’observer la manière dont ces espèces – certaines « invasives » – ont réellement (ou non) la capacité de se diffuser sur un territoire donné, selon les spécificités des habitats et des milieux présents qui peuvent différer fortement d’une région à une autre, y compris en Belgique.
Par-delà certaines réserves, les patrimoines arborés des parcs historiques (comme les collections dendrologiques du domaine de Mariemont, les jardins botaniques, les arboretums...) abritent une extraordinaire diversité biologique, rare et précieuse. De telles collections méritent d’être protégées, valorisées et pérennisées à travers une gestion appropriée et des renouvellements de plantations réétudiés en réponse aux défis climatiques et à ses effets déjà perceptibles (problèmes sanitaires et maladies émergentes).

Préserver et renouveler le patrimoine arboré
Face à la dégradation des habitats, notamment par l’agriculture et l’urbanisation, la préservation et le renouvellement du patrimoine arboré des parcs et jardins est devenu un sujet de société, en particulier en milieu urbain (ex. : le plan canopée de la Ville de Liège) mais aussi dans les sites patrimoniaux qui, en conservant des sujets sénescents, parfois âgés et souvent abîmés, abritent de nombreux micro-habitats, véritables réservoirs de biodiversité.
Maintenir ces sujets en vie le plus longtemps possible, y compris dans l’espace public, représente une économie de moyens et, dans le même temps, une opportunité de sensibiliser le public à la nature proche, aux bénéfices qu’elle nous rend, notamment par sa beauté, sa diversité et sa capacité de résilience. Contrairement à la majorité des activités humaines, la préservation de la nature doit s’envisager à long terme, d’où la difficulté de sa gestion et des mesures à prendre par les acteurs tant de la protection du patrimoine que de la nature et de l’aménagement du territoire ; par ailleurs, la nécessité pour les instances publiques concernées de fondre celles-ci dans un cadre légal, durable et harmonisé.

Un engagement fort pour les générations futures
« Ces réflexions montrent comment les parcs et jardins contribuent aux obligations belges et européennes en matière de biodiversité et de lutte contre les effets du réchauffement climatique.
Cette journée a également rappelé à quel point les parcs historiques
restent des outils essentiels de connexion à la nature et
peuvent être l’occasion de sensibiliser le public à la diversité et à la splendeur des espèces remarquables mais également à la faune et à la flore de proximité.
Sans conteste, l’avenir du patrimoine des parcs historiques engage les générations futures. Il implique à la fois
une évolution de la formation des futurs professionnels des métiers du paysage et du jardinage,
une éducation des citoyens à la diversité de la nature
et enfin, il appelle à
la responsabilité des instances publiques, pourtant peu représentées lors de cette journée de dialogue entre acteurs de terrain, afin de permettre ces évolutions sociétales et d’offrir aux citoyens la possibilité de côtoyer et d’observer des milieux naturels ou semi-naturels tant dans les centres urbains que dans les périphéries »,
conclut Nathalie de Harlez, initiatrice de cette deuxième journée de rencontre placée sous les signes de la biodiversité et du patrimoine.
Infos
Nathalie de Harlez
0479 / 971 384
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